I- Définition du surendettement
Une personne est surendettée lorsque, de bonne foi, elle est dans l'impossibilité manifeste de faire face (de payer) à l'ensemble de ses dettes non professionnelles (dettes personnelles) exigibles et à échoir, ainsi qu'à l'engagement qu'elle a donné de cautionner ou d'acquitter solidairement la dette d'un entrepreneur individuel ou d'une société dès lors qu'il n'a pas été, en droit ou en fait, dirigeant de celle-ci.
Cette définition relève de l'article L 330-1 du Code de la consommation.
Lorsque les ressources ou l'actif réalisable (biens pouvant être vendus) du débiteur le permettent, des mesures de traitement peuvent être prescrites devant la commission de surendettement des particuliers.
En l'absence de ressources suffisantes ou d'actif réalisable, le débiteur peut solliciter l'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel.
Certaines personnes ne peuvent bénéficier des dispositions du surendettement (art L. 333-2 du Code de la consommation) :
- toute personne qui aura sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts ;
- toute personne qui aura détourné ou dissimulé, ou tenté de détourner ou dissimuler, tout ou partie de ses biens ;
- toute personne qui, sans l'accord de ses créanciers, de la commission, ou du juge, aura aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou aura procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel.
Les dispositions du surendettement s'appliquent également aux débiteurs de nationalité française en situation de surendettement domiciliés hors de France et qui ont contracté des dettes non professionnelles auprès de créanciers établis en France (art L. 333-3-1 du Code de la consommation).
Le débiteur peut saisir à cet effet la commission de surendettement du lieu d'établissement de l'un de ces créanciers.
II- La procédure en matière de surendettement
1) La commission de surendettement
Il existe dans chaque département au moins une commission de surendettement des particuliers (art L. 331-1 du Code de la consommation) qui a pour mission de traiter, comme son nom l'indique, la situation de surendettement des personnes physiques (art L. 331-2).
Chaque commission de surendettement se compose :
- du représentant de l'Etat dans le département ;
- d'un président ;
- du trésorier-payeur général ;
- d'un vice-président ;
- du directeur des services fiscaux ;
- du représentant local de la Banque de France (assure le secrétariat de la commission) ;
- de deux personnalités choisies par le représentant de l'Etat dans le département (la première personne est choisie sur proposition de l'association française des établissements de crédit et la seconde sur propositions des associations familiales ou de consommateurs).
En outre :
- une personne justifiant d'une expérience dans le domaine de l'économie sociale et familiale ;
- et une personne justifiant d'une expérience dans le domaine juridique ;
sont associées à l'instruction du dossier et assistent aux réunions de la commission avec une voix consultative.
La procédure de surendettement est engagée à la demande du débiteur (de la personne physique) (art L. 331-3 du Code de la consommation).
En cas de cautionnement du débiteur pour une ou plusieurs de ses dettes, la commission informe la caution de l'ouverture de la procédure (et la caution peut faire connaître ses observations par écrit à la commission).
La commission dispose alors d'un délai de 6 mois, à compter du dépôt du dossier, pour procéder à l'instruction du dossier et décider de son orientation (art L. 331-3 du Code de la consommation).
La commission dresse l'état d'endettement du particulier qui doit lui déclarer les éléments actifs et passifs de son patrimoine.
La commission peut faire publier un appel aux créanciers (art L. 331-3 du Code de la consommation) :
- Les créanciers, à compter de leur information par la commission de l'état du passif déclaré par le débiteur, disposent d'un délai de 30 jours pour fournir, en cas de désaccord sur cet état, les justifications de leurs créances en principal, intérêts et accessoires. A défaut, la créance est prise en compte par la commission au vu des seuls éléments fournis par le débiteur.
- Les créanciers doivent également indiquer si leur créance fait l'objet d'un cautionnement et s'il a été ou non actionné.
La commission peut obtenir communication de tout renseignement de nature à lui donner une exacte information de la situation du débiteur, l'évolution possible de celle-ci et les procédures de conciliation amiables en cours, auprès (art L. 331-3 du Code de la consommation) :
- des administrations publiques ;
- des établissements de crédit ;
- des organismes de sécurité et de prévoyance sociale ;
- des services chargés de centraliser les risques bancaires et les incidents de paiement.
La commission peut demander aux collectivités territoriales et aux organismes de sécurité sociale de procéder à des enquêtes sociales (art L. 331-3 du Code de la consommation).
Si l'instruction du dossier laisse apparaître que la situation du débiteur est irrémédiablement compromise, la commission convoque le débiteur et, après avoir obtenu son accord, saisit le juge de l'exécution d'une demande d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel.
La saisine du juge aux fins de rétablissement personnel emporte suspension des voies d'exécution, y compris des mesures d'expulsion du logement du débiteur, jusqu'au jugement d'ouverture (art L. 331-3-1 du Code de la consommation).
A défaut d'accord du débiteur, la commission continue sa mission suivant la procédure de traitement des situations de surendettement.
La commission informe le débiteur de l'état du passif qu'elle a dressé.
Si le débiteur souhaite contester cet état de son passif, il dispose d'un délai de 20 jours pour demander à la commission la saisine du juge de l'exécution, aux fins de vérification de la validité des titres de créance et du montant des sommes réclamées, en indiquant les créances contestées et les pièces justificatives (art L. 331-4 du Code de la consommation).
La commission a pour mission de concilier les parties en vue de l'élaboration d'un plan conventionnel de redressement approuvé par le débiteur et ses principaux créanciers (art L. 331-6 du Code de la consommation).
Le plan peut comporter :
- des mesures de report des paiements des dettes ;
- des mesures de rééchelonnement des paiements des dettes ;
- des remises de dettes
- des réductions ou suppressions du taux d'intérêt ;
- des mesures de consolidation, de création ou de substitution de garantie.
Le plan peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette, il peut également les subordonner à l'abstention par le débiteur d'actes qui aggraveraient son insolvabilité.
Le plan prévoit les modalités de son exécution.
La durée totale du plan ne peut excéder 10 ans.
En cas d'échec de sa mission de conciliation, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, recommander tout ou partie des mesures suivantes (art L. 331-7 du Code de la consommation) :
- reporter ou rééchelonner le paiement des dettes (le report ou le rééchelonnement ne peut excéder 10 ans) ;
- imputer les paiements d'abord sur le capital ;
- prescrire que les sommes correspondant aux sommes reportées ou rééchelonnées porteront intérêt à un taux réduit qui peut être inférieur au taux d'intérêt légal sur proposition spéciale et motivée et si la situation du débiteur l'exige ;
- en ces de vente forcée du logement principal du débiteur, grevé d'une inscription bénéficiant à un établissement de crédit ayant fourni les sommes nécessaires à son acquisition, réduire, le montant de la fraction des prêts immobiliers restant due aux établissements de crédit après la vente après imputation du prix de vente sur le capital restant dû.
La commission peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette, elle peut également les subordonner à l'abstention par le débiteur d'actes qui aggraveraient son insolvabilité.
Devant la commission, les parties peuvent être assistées par toute personne de leur choix (art L. 331-10 du Code de la consommation).
2) Le juge de l'exécution
Le juge de l'exécution est compétent pour :
- la procédure de traitement des situations de surendettement devant la commission de surendettement des particuliers ;
- et la procédure de rétablissement personnel.
Le juge de l'exécution est compétent pour connaître des recours dirigés contre les décisions rendues par la commission en matière de recevabilité de la demande et d'orientation du dossier (art L. 331-3 du Code de la consommation).
Si le juge n'a pas été saisi d'une contestation, il confère force exécutoire aux mesures recommandées par la commission, après en avoir vérifié la régularité et le bien-fondé (art L. 332-1 du Code de la consommation).
Une partie peut contester devant le juge de l'exécution les mesures recommandées par la commission, dans les 15 jours de la notification qui lui en est faite (art L. 332-2 du Code de la consommation).
Avant de statuer, le juge peut :
- ordonner par provision l'exécution d'une ou plusieurs mesures ;
- faire publier un appel aux créanciers ;
- vérifier la validité et le montant des titres de créance et s'assurer la situation du débiteur ;
- prescrire toute mesure d'instruction qu'il estime utile ;
- obtenir communication de tout renseignement lui permettant d'apprécier la situation du débiteur et l'évolution possible de celle-ci.
III- La procédure spéciale de rétablissement personnel
Le juge de l'exécution peut, avec l'accord du débiteur, décider l'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel.
Au terme d'un délai de 9 mois à compter du dépôt du dossier, si la commission de surendettement n'a pas décidé de l'orientation du dossier, le débiteur peut saisir le juge aux fins d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel (art L 332-5 du Code de la consommation).
Le juge de l'exécution convoque le débiteur et les créanciers connus à une audience d'ouverture de la procédure de rétablissement personnel.
Le juge, après avoir apprécié lé caractère irrémédiablement compromis de la situation du débiteur et sa bonne foi, rend un jugement prononçant l'ouverture de la procédure.
Le jugement entraîne la suspension des procédures d'exécution diligentées contre le débiteur et portant sur les dettes autres qu'alimentaires. La suspension est acquise jusqu'au jugement de clôture.
Le juge de l'exécution peut désigner un mandataire, faire procéder à une enquête sociale et ordonner un suivi social du débiteur (art L. 332-6 du Code de la consommation).
Le mandataire ou le juge procède aux mesures de publicité destinées à recenser les créanciers qui produisent leurs créances.
Les créances qui n'ont pas été produites dans un délai fixé par décret seront éteintes, sauf à ce que le juge prononce un relevé de forclusion.
A compter du jugement prononçant l'ouverture de la procédure, le débiteur ne peut aliéner ses biens sans l'accord du mandataire ou du juge (art L. 332-7 du Code de la consommation).
Le juge statue sur les éventuelles contestations de créances et prononce la liquidation judiciaire du patrimoine du débiteur, dont sont exclus les biens insaisissables (art L. 332-8 du Code de la consommation).
Le juge désigne un liquidateur qui peut être le mandataire.
Le liquidateur dispose d'un délai de 12 mois pour vendre les biens du débiteur à l'amiable, ou, à défaut, organiser une vente forcée.
Le liquidateur procède à la répartition du produit des actifs et désintéresse les créanciers suivant le rang des sûretés assortissant leurs créances.
Le liquidateur rend compte de sa mission au juge de l'exécution.
Si l'actif réalisé est suffisant pour désintéresser les créanciers, le juge prononce la clôture de la procédure (art L. 332-9 du Code de la consommation).
Si l'actif réalisé est insuffisant, le juge prononce la clôture pour insuffisance d'actif.
La clôture entraîne l'effacement de toutes les dettes non professionnelles du débiteur, à l'exception de celles dont le prix a été payé au lieu et place du débiteur par la caution ou le coobligé.
Le juge peut ordonner des mesures de suivi social du débiteur.
A titre exceptionnel, si le juge estime que la liquidation judiciaire peut être évitée, il établit un plan comportant des mesures de traitement de surendettement (art L. 332-10 du Code de la consommation).
La durée de ce plan ne peut excéder 10 ans.
Les personnes qui ont bénéficié de la procédure de rétablissement personnel font l'objet d'une inscription au fichier pour une période de 8 ans.
IV- Le projet de loi concernant le crédit à la consommation et le surendettement des particuliers
Mme Christine LAGARDE, Ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, a présenté devant la commission de surendettement de Saint Denis le projet de loi portant réforme du crédit à la consommation.
Ce projet de loi a vocation à améliorer l'efficacité de la procédure de surendettement qui touche de plus en plus de français et de familles.
En ce sens, il propose 5 grandes mesures :
- Les personnes, propriétaires de leur résidence principale, pourront maintenant prétendre à bénéficier de la procédure de surendettement, sans que leur dossier ne soit rejeté automatiquement.
- Les intérêts intercalaires (intérêts contractuels à compter de l'établissement contradictoire de l'état du passif et jusqu'à la mise en œuvre effective des mesures d'apurement des dettes) seront suspendus.
- Une mission d'analyse sur les relations entre les banques et les consommateurs surendettés va être constituée.
- Les échanges d'information entre les commissions de surendettement et les consommateurs surendettés vont être simplifiés, dématérialisés, et rendus plus rapides.
- Sur la base du volontariat, les membres des commissions de surendettement pourront profiter de formations pour faciliter et améliorer leur travail.
Le FICP (fichier national des incidents de remboursement des crédits) sera rendu plus performant afin de mieux lutter contre le surendettement des consommateurs.
Ainsi, le FICP devra-t-il être alimenté en temps réel par les établissements de crédit.
Les durées d'inscription au sein de ce fichier vont être réduites afin de permettre un meilleur et plus rapide rebond des personnes surendettées.
Ce projet de loi portant réforme du crédit à la consommation a été adopté en première lecture par le Sénat, le 17 juin 2009.
Il doit encore être voté par l'Assemblée Nationale.