Le mandat de protection future

Fiches

Le 16/10/2009

Face au vieillissement de la population, un souci gagne de nombreux français : Comment puis-je anticiper une future perte de mon autonomie et de mes capacités ? Ou encore comment puis-je organiser la vie future de mon enfant handicapé, après ma dispar

I- Quelle définition pour le mandat de protection future ?



Le mandat de protection de future est issu de la loi du 5 mars 2007 (loi n° 2007-308), qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2009.
Cette loi porte réforme des tutelles et créée un nouveau dispositif, ledit mandat de protection future.

L'article 477 du Code Civil pose la définition du mandat de protection future :

« Toute personne majeure ou mineure émancipée ne faisant pas l'objet d'une mesure de tutelle peut charger une ou plusieurs personnes, par un même mandat, de la représenter au cas où elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses intérêts.
La personne en curatelle ne peut conclure un mandat de protection future qu'avec l'assistance de son curateur.
Les parents, ou le dernier vivant des parents, ne faisant pas l'objet d'une mesure de curatelle ou de tutelle, et qui exercent l'autorité parentale sur leur enfant mineur ou assument la charge affective et matérielle de leur enfant majeur, peuvent, dans le cas où cet enfant ne pourrait pas pourvoir seul à ses intérêts, désigner un ou plusieurs mandataires chargés de le représenter.
Le mandat de protection future est conclu par acte notarié ou acte sous-seing privé, sauf le mandat conclu par les parents pour leur enfant qui doit être conclu par acte notarié. »

Le mandat de protection future permet à une personne disposant actuellement de toutes ses capacités (en pleine possession de ses moyens intellectuels) de désigner à l'avance un tiers de confiance qui aura pour mission de la représenter en cas d'incapacité future (d'altération future de ses facultés).
Ce mandat prend donc effet au jour où l'incapacité est médicalement constatée.

Ce mandat peut être général ou spécial (ne concerne que quelques actes définis), ainsi les pouvoirs du mandataire peuvent être limités.

Ce mandat peut être passé devant notaire (mandat dit authentique) ou être décidé sans l'intervention d'un notaire par un simple acte signé entre deux particuliers (mandat sous-seing privé).
Le mandat authentique permet au mandataire d'exercer une protection juridique très étendue (par ex : le mandataire peut vendre ou acheter des biens).
Le mandat sous-seing privé est limité aux actes conservatoires ou de gestion courante (le mandataire est alors un administrateur légal sous contrôle judiciaire).

Ce dispositif novateur est notamment très utile aux parents d'un enfant handicapé qui veulent organiser sa protection au moment de leur décès, ou encore à toute personne souhaitant anticiper une incapacité future (une altération future de ses capacités) et faire face à une perte future de son autonomie.


II- Qui peut être choisi comme mandataire ?



Le mandataire peut être (art 480 du Code civil) :
  • toute personne physique choisie par le mandant
  • ou une personne morale (société, association…) inscrite sur la liste des mandataires judiciaires à la protection des majeurs.


Le mandataire doit, pendant toute l'exécution du mandat, jouir de la capacité civile.

En outre, ne peuvent être mandataire :
  • les mineurs non émancipés,
  • les majeurs qui bénéficient d'une mesure de protection juridique,
  • les personnes à qui l'autorité parentale a été retirée,
  • les personnes à qui l'exercice des charges tutélaires a été interdit en application de l'article 131-26 du Code pénal,
  • les membres des professions médicales et de la pharmacie ainsi que les auxiliaires médicaux, à l'égard de leurs patients.


Le mandataire doit exécuter personnellement le mandat (art 482 du Code civil).
Un tiers peut cependant exercer le mandat, à la place du mandataire, pour les actes de gestion du patrimoine mais seulement à titre spécial. Et, dans cette hypothèse, le mandataire est responsable (répond) de la personne qu'il s'est substituée.

Le mandataire ne peut, pendant l'exécution du mandat, être déchargé de ses fonctions qu'avec l'autorisation du juge des tutelles (art 480 du Code civil).


III- Quelles sont les règles encadrant le mandat ?



1) Le début du mandat



Selon l'article 481 du Code civil, le mandat prend effet lorsqu'il est établi que le mandant ne peut plus pourvoir seul à ses intérêts.
Le mandataire produit au greffe du tribunal d'instance le mandat et un certificat médical attestant que le mandant ne peut plus pourvoir seul à ses intérêts.
Le greffier vise le mandat et date sa prise d'effet, puis le restitue au mandataire.
Le mandant reçoit alors notification de la prise d'effet du mandat.

2) La fin du mandat



Le mandat mis à exécution prend fin par (art 483 du Code civil) :
  • le rétablissement des facultés personnelles de l'intéressé constaté à la demande du mandant ou du mandataire,
  • le décès de la personne protégée ou son placement en curatelle ou en tutelle, sauf décision contraire du juge qui ouvre la mesure,
  • le décès du mandataire, son placement sous une mesure de protection,
  • la révocation du mandat prononcée par le juge des tutelles.


Le juge qui met fin au mandat peut ouvrir une mesure de protection juridique (curatelle, tutelle…) (art 485 du Code civil).

Le juge peut également suspendre les effets du mandat pour le temps d'une mesure de sauvegarde de justice.

3) L'exécution du mandat



Tout intéressé peut saisir le juge des tutelles aux fins de contester la mise en œuvre du mandat ou de voir statuer sur les conditions et modalités de son exécution (art 484 du Code civil).

Si la mise en œuvre du mandat n'est pas suffisante, en raison du champ d'application du mandat, à protéger les intérêts personnels et patrimoniaux de la personne, le juge peut ouvrir une mesure de protection juridique complémentaire confiée, le cas échéant, au mandataire (art 485 du Code civil).
Le juge peut également autoriser le mandataire à accomplir un ou plusieurs actes déterminés (précisés par le juge) non couverts par le mandat.


IV- Quel est le rôle du mandataire ?



Le mandataire chargé de l'administration des biens de la personne protégée fait procéder à leur inventaire lors de l'ouverture de la mesure (prise d'effet du mandat) (art 486 du Code civil).
Il devra également assurer l'actualisation de cet inventaire au cours de l'exécution du mandat.

Le mandataire établit aussi annuellement le compte de sa gestion des biens, qui pourra faire l'objet d'une vérification (art 486 du Code civil).

En outre, à l'expiration du mandat, et dans les 5 ans qui suivent, le mandataire tient à la disposition de :
  • la personne qui est amenée à poursuivre la gestion,
  • de la personne protégée si elle a recouvré ses facultés
  • ou de ses héritiers,

l'inventaire actualisé des biens, ainsi que les 5 derniers comptes de gestion et les pièces nécessaires pour continuer la gestion ou assurer la liquidation de la succession de la personne protégée (art 487 du Code civil).

Les actes passés et les engagements contractés par une personne faisant l'objet d'un mandat de protection future, mis à exécution pendant la durée du mandat, peuvent être rescindés pour simple lésion ou réduits en cas d'excès (art 488 du Code civil).
Les tribunaux prennent en considération l'utilité ou l'inutilité de l'opération, l'importance ou la consistance du patrimoine de la personne protégée, et la bonne ou mauvaise foi de ceux avec qui elle a contracté.
Cette action ne peut être menée que par la personne protégée ou, à sa mort, par ses héritiers.
L'action est prescrite par le délai de 5 ans.


V- Quelle et la forme du mandat ?


Le mandat peut être conclu par acte sous-seing privé ou par acte notarié.

1) Le mandat conclu par acte notarié



Un mandat dit notarié, car conclu par notaire choisi par le mandant, est un acte dit authentique.
Un acte authentique est un acte qui, étant établi par un officier ministériel (notaire), fait foi jusqu'à inscription de faux (jusqu'à ce que la preuve de la fausseté du document soit rapportée).
Il a donc une valeur supplémentaire par rapport à un simple acte conclu entre les parties, dit acte sous-seing privé.

Tant que le mandat n'a pas pris effet, le mandant peut le modifier dans les mêmes formes, à savoir par acte authentique (acte notarié) (art 489 du Code civil).
De même, tant que le mandat n'a pas pris effet, le mandant peut le révoquer en notifiant sa révocation au mandataire et au notaire et le mandataire peut, lui aussi, renoncer au mandat en notifiant sa renonciation au mandant et au notaire.

Le mandat authentique, même conçu en termes généraux, inclut tous les actes patrimoniaux qu'un tuteur aurait le pouvoir d'accomplir seul ou avec une autorisation (art 490 du Code civil).
Toutefois, le mandataire ne peut pas accomplir un acte de disposition à titre gratuit (ex : un don) sans l'autorisation du juge des tutelles.

Le mandataire rend compte au notaire (le notaire qui a rédigé le mandat) en lui adressant ses comptes et toutes les pièces justificatives utiles (art 491 du Code civil).
Le notaire assure la conservation de ses pièces, ainsi que de l'inventaire des biens et de ses actualisations.
Le notaire saisit le juge des tutelles de tout mouvement de fonds et de tout acte non justifiés ou qui n'apparaissent pas conformes aux stipulations du mandat.

2) Le mandat conclu par acte sous-seing privé



Le mandat établi par acte sous-seing privé est daté et signé de la main du mandant (art 492 du Code civil).
Ledit mandat est :
  • soit contresigné par un avocat,
  • soit établi selon le modèle défini par décret (décret en Conseil d'Etat).


Le mandataire accepte le mandat en y apposant également sa signature (art 492 du Code civil).

Tant que le mandat n'a pas reçu exécution, le mandant peut le modifier ou le révoquer dans les mêmes formes et le mandataire peut y renoncer en notifiant sa renonciation au mandant (art 492 du Code civil).

Le mandat sous-seing privé est plus limité que le mandat authentique.
Le mandat sous-seing privé est limité, quant à la gestion du patrimoine, aux actes qu'un tuteur peut accomplir seul sans avoir besoin d'une autorisation (art 493 du Code civil).
Si l'accomplissement d'un acte qui est soumis à autorisation, ou qui n'est pas prévu dans le mandat, s'avère nécessaire dans l'intérêt du mandant, le mandataire saisit le juge des tutelles pour voir ordonner cet acte.

Le mandataire conserve l'inventaire des biens et ses actualisations, les cinq derniers comptes de gestion et toutes les pièces justificatives ou utiles (art 494 du Code civil).
Le mandataire est tenu de les présenter au juge des tutelles ou au procureur de la République.
Mots clés : Mesures de protection, Particuliers, Droit des personnes