Délinquance environnementale et marchés publics

Actualités juridiques

Le 16/02/2009

Faisant suite à une question écrite relative à la prise en considération de la délinquance environnementale dans le Code des marchés publics et, plus précisément, à l'interdiction éventuelle de soumissionner à la commande publique les opérateu

Faisant suite à une question écrite relative à la prise en considération de la délinquance environnementale dans le Code des marchés publics et, plus précisément, à l'interdiction éventuelle de soumissionner à la commande publique les opérateurs économiques délinquants environnementaux, le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire a notamment indiqué que l'interdiction d'accès aux marchés publics est une peine complémentaire que le juge peut assortir à la condamnation à titre principal pour tout délit.

Précisément :

« la loi n° 2008-757 du 1er août 2008 relative à la responsabilité environnementale et à diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'environnement a introduit dans le livre Ier du code de l'environnement un titre VI consacré à la prévention et la réparation de certains dommages causés à l'environnement, dans le cadre de la transposition de la directive 2004/35/CE du 21 avril 2004 sur la responsabilité environnementale.

Ces nouvelles dispositions prévoient qu'il revient à l'exploitant dont l'activité a causé ou menace de causer un dommage grave aux sols, aux eaux ou aux espèces et habitats naturels protégés par la législation communautaire, de prendre les mesures de prévention ou de réparation nécessaires, la réparation s'entendant en premier lieu par la remise des milieux ou ressources endommagés dans l'état qui était le leur avant le dommage. Sous réserve de quelques exceptions, l'exploitant en cause assume la charge financière de ces mesures. Il s'agit de traduire concrètement le principe dit « pollueur-payeur ». Au regard de ce dispositif, l'exploitant n'encourt de sanctions pénales que s'il fait obstacle à l'exercice des fonctions des agents chargés de contrôler l'application du titre VI du livre Ier du code de l'environnement ou s'il refuse de se conformer à la mise en demeure de prendre les mesures de prévention ou de réparation nécessaires prononcées par l'autorité administrative compétente. Toutefois, aux termes de l'article L. 164-1 du nouveau du code de l'environnement, l'application du présent titre ne fait obstacle à la mise en œuvre d'aucun régime de police spéciale : les dommages causés par l'exploitant aux milieux ou ressources considérés l'exposent, le cas échéant, aux sanctions pénales prévues notamment par les dispositions du code de l'environnement en cas d'atteinte à ces milieux ou ressources.

Ainsi, la mise en œuvre des obligations découlant des dispositions législatives nationales transposant la directive communautaire n'induit pas nécessairement un comportement susceptible d'entraîner des poursuites pénales et, en conséquence, ne conduit pas par lui-même au prononcé d'une condamnation pénale qui produirait des effets incapacitants au regard de la commande publique.

Pour autant et de manière plus large, il n'est pas envisagé à ce jour de créer un régime d'interdiction de soumissionner en cas de condamnation définitive pour un délit d'atteinte à l'environnement. En effet, un tel mécanisme pourrait présenter des effets préjudiciables aux intérêts mêmes des personnes publiques de par son automaticité, méconnaissant tant la gravité de l'infraction que le lien éventuel entre le délit constitué et l'objet du marché. Au demeurant, une telle disposition ne serait pas compatible avec l'article 45 de la directive 2004/18 relative aux marchés publics qui énonce une liste limitative des délits pouvant donner lieu à interdiction de soumissionner et dont les délits environnementaux ne font pas partie, sauf à être en relation directe avec l'objet du marché.

En revanche, l'interdiction d'accès aux marchés publics est une peine complémentaire que le juge peut assortir à la condamnation à titre principal pour tout délit. Ainsi, l'article L. 131-39 (§ 5) du code pénal dispose que « lorsque la loi le prévoit à l'encontre d'une personne morale, un crime ou un délit peut être sanctionné d'une ou de plusieurs des peines suivantes : (...) 5° L'exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus ». Cette disposition pourra s'appliquer aux cas de condamnation pour délit sanctionné par une des nombreuses dispositions pénales présentes dans le code de l'environnement, qui sont applicables aux personnes morales. Un tel mécanisme fondé sur la décision d'un juge apporte en effet les garanties d'individualisation et de proportionnalité de la peine et pourra constituer un volet dissuasif supplémentaire en cas de poursuites pénales, lorsque celles-ci sont notamment exercées en parallèle à la mise en œuvre du régime de réparation instauré par la loi n° 2008-757 du 1er août 2008 relative à la responsabilité environnementale ».



Source :

JO Sénat, Q. 05860, 5/02/2009, page 311.
Mots clés : Professionnels, Droit public